L’image de marque ne se limite pas à un logo et à un cahier de normes graphiques! C’est la combinaison de tous les éléments qui vont soutenir la crédibilité et la réputation d’une entreprise. ÈVE LAURIER, directrice d’EDELMAN MONTRÉAL, répond à nos questions sur l’envers du branding.
Quelle est l’importance d’une image de marque forte pour une entreprise?
Ève Laurier: L’image de marque, c’est un cri de ralliement. Dans le monde numérique dans lequel on évolue, on ne s’adresse plus strictement à notre public interne (employés, CA) et externe (consommateurs, fournisseurs, gouvernements), mais à un monde beaucoup plus vaste géographiquement. Un professeur qui m’a enseigné au MBA, Henry Mintzberg, parlait de l’importance de l’artefact. Pour moi, la marque est un artefact que toutes les parties prenantes peuvent reconnaître, qui donne le ton et qui rassemble tout le monde. Ne pas soigner son image de marque comme entreprise, c’est comme faire une maison sans fondation.
À quel moment est-il nécessaire de bâtir son image de marque?
Il faut y penser dès le jour un. Il y a le nom et l’identité visuelle de l’entreprise sur lesquels les entrepreneurs travaillent en priorité, mais la réflexion sur la raison d’être de la marque arrive trop tard et est tout aussi importante. Il faut se poser les bonnes questions: Que veut dire la marque? Quelle est sa raison d’être? Comment se définit-on? Où est-ce qu’on se positionne sur le marché? Si on ne définit pas ces points et qu’on ne les met pas en commun dès le départ, on laisse l’occasion aux autres de le faire pour nous. Une fois que l’image de marque est créée et qu’elle est cohérente, il faut en faire la promotion, la défendre. Le nerf de la guerre pour qu’une marque ne déçoive pas, c’est sa réputation, sa crédibilité et sa fiabilité.
Quelles sont les plus récentes tendances en ce qui concerne l’image de marque?
Il y a plusieurs tendances dans les domaines publicitaire et graphique qui sont étudiées méticuleusement: les couleurs, les formes, les polices de caractère, etc. Du côté des communications, la tendance est à l’engagement social. Les entreprises se positionnent davantage par rapport à leurs valeurs que par rapport à leur produit ou service. Elles souhaitent être des agents de changement dans la société et mettent en lumière leur conscience sociale et environnementale. Les gens s’engagent dans cette voie pour humaniser leur marque.
Y a-t-il des exemples récents qui vous ont interpellé?
On est parfois rendu très loin du produit ou du service. C’est le cas notamment de récentes publicités de Nike ou de Patagonia où on ne voit pas le produit, mais la mission, les valeurs, les idéaux auxquels la marque croit et qu’elle veut défendre, quitte à perdre des clients pour en gagner d’autres.
Un autre bel exemple est le brasseur danois Carlsberg qui a choisi d’investir son budget de marketing en recherche et développement pour trouver une alternative aux bagues d’emballage en plastique sur ses packs de six cannettes. L’entreprise a trouvé une colle écologique pour réduire les déchets. Elle n’a pas fait de publicité et a sorti le produit. Ça a créé le buzz dans les médias sociaux.
Une autre tendance qui émerge: certaines marques existent entièrement de manière numérique. L’entreprise ne produit donc plus de papier. Je pense entre autres à TheRealReal ou à Wayfair à titre d’exemples. Il n’y a pas si longtemps, on ne parlait pas de l’empreinte écologique de sa marque. Maintenant on la connaît, on en parle et même qu’on la met de l’avant dans toutes nos communications.

Les jeunes entrepreneurs suivent-ils cette vague?
Je vois effectivement plusieurs start-ups dont l’idée de départ est d’aller régler un problème social. On voit aussi que les jeunes talents, des milléniaux, choisissent de travailler pour une entreprise en fonction de leurs programmes (pour la communauté, pour réduire leur empreinte écologique, pour assurer des salaires équitables entre les hommes et les femmes, etc.) Ils veulent être authentiques dans leur lieu de travail et ne rien avoir à cacher. Il faut se rappeler que les personnes qui sont le plus capables de faire mal à une image de marque, ce sont les employés. Ce sont les grands oubliés dans le développement stratégique, mais ce sont eux qui peuvent valider que ce que la marque dit soit vrai.
Quels seraient vos conseils pour définir une image de marque forte et attrayante?
Tout d’abord, il faut déterminer qui sont toutes les parties prenantes internes et externes de la marque et s’interroger sur le genre de message qui va les interpeller, sur la façon de leur parler. Il ne faut pas hésiter à cocréer la marque avec eux. On peut établir la ligne directrice et ensuite aller tester avec nos employés, nos clients, nos fournisseurs, la chambre de commerce local… Il faut les impliquer dans le processus pour leur présenter les produits ou services et voir si c’est cohérent pour eux. Ceux-ci deviendront souvent des influenceurs et des ambassadeurs naturels pour la marque. On s’assure ainsi d’avoir une marque plus solide et plus facilement déployable. Il ne faut pas imposer une marque, il faut mériter l’attention.

Ève Laurier
directrice d’Edelman Montréal
Vos sources d’inspiration: «j’ai besoin d’espace, de marcher, de déconnecter. Ce sont dans des moments en pleine nature que j’ai les meilleures idées et une clarté d’esprit».
Votre modèle/mentor: Oprah
Votre style de leadership: Inspirante, inclusive, heureuse
Votre outil indispensable: Avoir la meilleure équipe!
Edelman
Fondation: Chicago, 1952
Siège social: New York
Nombre d’employés: 7000 (40 à Montréal)
Chiffre d’affaires: privé
Axe de services: communications marketing