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Rédactrice, analyste, critique, Isabelle Naessens est une femme réfléchie, engagée et versatile qui a œuvré en relations internationales avant de se tourner vers la communication. Stratège relationnelle créative, elle se joint à l’équipe de Henkel Média en tant que rédactrice principale et créatrice de contenus.
ISABELLE NEASSENS
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FILER LE PARFAIT AMOUR AVEC LES MICROBRASSEURS DE CHEZ NOUS
Depuis une décennie, les Québécois vivent une lune de miel avec les microbrasseurs du terroir.


AFFAIRES & ÉCONOMIE
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Depuis plus de dix-huit mois, les restaurateurs font des pieds et des mains pour s’ajuster, quand ils ne sont pas tenus de fermer à la seconde : réorganisation des salles à manger, mise en place de registres et plexiglas, confection de menus à emporter, boîtes et autres prêts-à-assembler, livraisons de paniers et services sans contact. Aux capacités d’accueil réduites et au manque de personnel, s’ajoute maintenant la supervision des passeports vaccinaux. L’inconfort est palpable, même si plusieurs préfèrent cette solution. Les avis divergent entre grogne et soulagement.

La solution du moindre mal
« C’est certain qu’on s’en serait passé, mais entre fermer et la possibilité d’ouvrir les salles à manger, on préfère composer avec les ajustements nécessaires », avance François Meunier de l’Association Restauration Québec (ARQ), qui représente 20 000 restaurateurs. « L’industrie a été très touchée par les mesures qu’il a fallu mettre en place, encore plus dans le contexte de pénurie de main-d’œuvre, exacerbé par la pandémie de COVID-19. On a pu chiffrer la décroissance à 40 % pour ceux qui offrent le service aux tables : ce sont cinq milliards de dollars en moins dans les caisses en un an. Alors même s’il y a beaucoup de lourdeur dans l’organisation et une responsabilité de plus sur les épaules des restaurateurs, le passeport permet d’ouvrir les salles à manger ».
Éric Champoux, le jeune propriétaire fondateur des quatre bistros sportifs La Chambre partage son soulagement : « On commençait tout juste à se placer et à ravoir du personnel, alors je prends l’option d’ouvrir car j’ai trop à perdre à refermer encore. J’ai essayé la livraison pendant huit mois, mais ce n’est pas mon marché; 75 % de mon pied carré est en salle à manger ».

Un achalandage nettement à la baisse
Depuis un an, la bannière de La Chambre a été rachetée par le franchiseur Foodtastic. « La majorité des 425 partenaires observe la même tendance que chez moi : une baisse d’achalandage de 30 à 40 %, se désole M. Champoux. Ce n’est pas évident à comprendre alors qu’on parle d’environ 85 % de gens vaccinés. On va être patient et espérer que la clientèle se représente ».
Pour M. Meunier, la baisse est variable et elle s’explique en outre par le début de la rentrée scolaire, le fait que la reprise du tourisme international en est à ses balbutiements, que les tours à bureaux sont toujours vides, et que les événements ont des capacités restreintes – une observation qui s’applique dans les grands centres urbains principalement. « On reporte à nouveau les mariages et les congr ès. Le Montréal gastronomique ne peut plus rêver de recevoir la masse des 300 000 personnes en un soir comme avant à l’occasion du Festival international de jazz de Montréal. »
Une solution qui n’en est pas toujours une
Si les couvre-feux, fermetures et ajustements constants ont secoué les mécaniques des bars et restaurants, la gestion du passeport vaccinal est une consigne de plus qui vient toucher à la main-d’œuvre dans un contexte de rareté. « C’est sûr que ce n’est pas évident, raconte M. Champoux. Il faut avoir les moyens d’avoir une hôtesse en permanence à l’accueil et si ça déborde, il faut que le serveur s’assure de le redemander aux tables ».
Pour certains, l’imposition du passeport sonne définitivement le glas. Il n’est tout simplement plus possible de rester ouvert, en particulier pour les petits restaurants avec service aux tables. « Depuis février 2020, il y a eu 2500 fermetures, dont 900 à Montréal et 175 à Québec, confie M. Meunier. C’est entre 10 et 15 % selon les régions. Les faillites sont toutefois de moins en moins nombreuses d’année en année, grâce aux mesures d’aide du gouvernement. Ceci dit, il est trop tôt pour dresser un réel bilan, car on vit sur du temps emprunté, et les taux d’endettement sont élevés ».

Fermeture ou zone libre
Le passeport vaccinal a du mal à passer. Parmi ceux qui peuvent vivre avec le prêt-à-emporter, certains s’affichent en fermant leurs salles à manger et en verbalisant leur mécontentement. C’est le cas notamment de Ristorante Via, Jerk Sport et Caffè Roma à Montréal ou du Snack Branché à Québec. « Ici, on porte un sourire », « Ici, on respecte votre choix » : des commerçants souhaitent respecter les choix de leur clientèle. Sur la devanture du Gaia, il y a une pastille verte sur laquelle on peut lire : « Tous sont bienvenus, avec ou sans pass sanitaire. » C’est l’autocollant du collectif français Zone libre.
Carole Laplante, la propriétaire, respecte les consignes tout en soulignant leur incohérence : « Les clients peuvent emporter leur repas et le manger sur les tables à pique-nique qui bordent le restaurant car cette aire ne fait pas partie de notre cadastre, explique-t-elle. La terrasse, elle, doit être fermée. »
Si certains rivalisent d’ingéniosité et trouvent des brèches, d’autres sont prêts à défier la mesure : « Je veux accueillir mes clients assis sans discriminer, c’est une question de valeurs. » Les amendes sont pourtant lourdes : entre 1000 $ et 6000 $ par infraction, plus les frais. Le montant augmente en cas de récidive et la mise en demeure pend au bout du nez des contrevenants.
Ailleurs dans le monde, des restaurateurs refusent aussi de fermer leur salle à manger et de jouer à la police.
« C’est souvent au moment où la goutte d’eau fait déborder le vase que débutent les changements les plus positifs », dit-on.
Restauration: le passeport vaccinal est-il un mal pour un bien?
2021-09-23
ISABELLE NEASSENS
5 minutes

Les clients et restaurateurs qui ne respectent pas les obligations liées au passeport vaccinal s’exposent à de lourdes sanctions, depuis le 15 septembre. Le milieu, échaudé par des mois de fermeture, soutenu tant bien que mal par des prêts et subventions, et amputé de personnel, peine à garder la tête haute. Comment l’industrie de la restauration voit-elle l’avenir proche et quelles sont les avenues possibles ? Nous avons discuté avec une poignée d’entrepreneurs et avec l’Association Restauration Québec.
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