L’emballage sous le microscope

Séries: Femmes en science

Mélissa Proulx

7 février 2019

4 minutes

Née en Algérie, Mounia Arkoun, 34 ans, a fait un long détour scolaire avant de se retrouver au doctorat en sciences et ingénierie des polymères à Montréal. C’est dans les laboratoires de Polytechnique qu’elle et sa partenaire Nury Ardila ont développé un bioplastique capable de révolutionner l’industrie des emballages alimentaires.

L’ingénieure chimiste, aujourd’hui cofondatrice et présidente d’Evio et mère de deux enfants, m’a reçue dans son laboratoire. Rencontre en cinq axes.

L’étincelle pour les sciences

«Les sciences, la physique et la chimie étaient mes matières préférées à l’école. J’étais passionnée par les sciences du vivant, de la nature, mais plus encore à l’échelle moléculaire, microscopique. J’étais attirée par les molécules qui pouvaient nous être utiles, comme la synthèse de médicaments. À la maison, mes parents m’ont toujours sensibilisée à la protection de la planète. Mon grand-père était un inventeur aussi. Il a créé un procédé pour faire sécher des figues à l’échelle industrielle. Peut-être m’a-t-il influencée aussi?»

Le parcours scolaire

«En Algérie, j’ai fait un BAC en microbiologie. Puis, en France, j’ai fait une maîtrise en biotechnologies alimentaires. Petit à petit, ce sont les interactions entre l’aliment et son emballage qui m’ont intriguée. Des molécules chimiques de l’emballage se retrouvent parfois dans l’aliment et sont ingérées par le consommateur… En venant ici, je savais que je voulais faire un doctorat à ce sujet et j’ai saisi l’occasion à Polytechnique.»

HenkelMedia.com

«À l’heure actuelle, on pollue beaucoup pour produire des emballages. On ne dit pas qu’on va régler le problème de pollution, du gaspillage alimentaire ou de la faim dans le monde. Mais ça commence par des petits gestes et avec cette technologie, on essaie d’apporter notre pierre à l’édifice.» – Mounia Arkoun

 

L’invention

«Nury Ardila, ma partenaire, a été une des plus belles rencontres de mon doctorat. Nous avions des projets similaires et un objectif commun. Nous avons créé un emballage à base de chitosane (la fibre extraite des carapaces de crustacés). Celui-ci est biodégradable, sécuritaire et antibactérien et permet de prolonger la durée de vie des aliments. Il aurait été bien dommage que cette technologie ne sorte jamais du laboratoire. Pourquoi ne pas le commercialiser?, que nous nous sommes demandé. La surprise a été de constater qu’à travers son programme Technopreneur, Polytechnique offrait tout le support et les outils nécessaires pour concrétiser notre projet d’affaires.

La demande de brevet a été déposée. Nous avons un partenaire dans l’industrie alimentaire et un autre en fabrication d’emballage. Nous complétons la phase de développement et visons la fin 2020 pour commencer les préventes.»

 

La passion

«J’adore la recherche. C’est ce qui fait avancer les sciences, les connaissances. J’aime aller dans une direction, chercher une solution et déboucher sur quelque chose à laquelle on ne s’attendait pas du tout. Une solution qui répond à un réel problème dans l’industrie ou chez les consommateurs.

J’aime ce qui est utile, pratique et concret. J’ai côtoyé des chercheurs qui développaient des technologies qui allaient aider des personnes en fauteuil roulant. Le génie chimique peut servir et améliorer tellement de choses dans la société.»

Allez, les filles!

«Ce que je dirais aux jeunes filles qui hésitent à se lancer dans un domaine des sciences, c’est que peu importe le métier choisi, ça vaut la peine d’aller chercher un diplôme pour avoir de la crédibilité et maîtriser son domaine mieux que quiconque. Des difficultés, il y en aura, mais il y en a partout.»

En chiffres

•12,8 % des ingénieurs en exercice au Canada sont des femmes

•20% des étudiants inscrits à des programmes d’études en génie sont des femmes

Source: Ingénieurs Canada, selon le rapport de 2016

À propos de l'auteur(e)

Mélissa Proulx

À propos de Mélissa Proulx

rédactrice - journaliste

Mélissa Proulx est une journaliste, chroniqueuse et rédactrice. Elle se consacre avec passion et créativité à l’élaboration de contenus journalistiques riches et variés depuis 2002.