Se lancer en entrepreneuriat est un défi en soi. En tant que femme, il y a un autre niveau de complexité. Pour encourager l’entrepreneuriat au féminin, ÉcoMaris a créé un nouveau programme de mentorat. À bord de son voilier école, huit jeunes avec des visées intrapreneuriales et entrepreneuriales ont navigué la Route des Possibles sur le Fleuve Saint-Laurent, accompagnées de femmes d’affaires mentores qui les suivront pendant un an.
Entre confiance en soi et humilité, goût du risque et capacité à gérer, à prévoir et à communiquer, la palette des aptitudes entrepreneuriales à maîtriser pour parvenir à concrétiser une idée et en faire un projet d’affaires viable est large, et peut être déstabilisante. ÉcoMaris a rassemblé des jeunes femmes qui portent en elles un rêve d’entreprise pour apprendre à mieux se définir en se mesurant à plus grand qu’elles, le Fleuve et des entrepreneures aguerries.
Le voilier, un outil de transformation expérientiel
« Sur le bateau, on est confronté à plus fort que soi, il faut savoir assumer une perte de contrôle et de repères totale, et apprendre en premier lieu le lâcher-prise » avance Joëlle Boily, directrice des programmes chez ÉcoMaris, un organisme à vocation socio-professionnelle qui crée des expériences d’apprentissages en mettant les participants directement dans l’action. Pour les mentores, des femmes d’affaires habituées à gérer et à contrôler, c’est souvent déstabilisant d’être face aux vents et aux marées. Pour les jeunes, elles sont vraiment confrontées à elles-mêmes, à leurs limites ».
Pour les candidates sélectionnées, le travail de défrichage reste souvent à faire. « On leur demande de proposer un plan d’affaires et de lancer un pitch, c’est leur devoir avant de monter à bord », explique Joëlle. Au fur et à mesure, les idées se peaufinent. « Ça les amène souvent à faire des changements pour aller vers ce qu’elles veulent vraiment être ou proposer, et quelque fois aussi à réajuster le tir ».

Bâtir sa confiance et son réseau
Rendre le rêve palpable, c’est une bouffée de confiance. Jade Boutin-Boulais, qui souhaite concrétiser son idée de ferme textile confirme : « Au fur et à mesure, à force de mettre des mots sur mon projet, de mieux l’emballer pour le présenter aux autres, j’ai cassé la glace et j’ai pris confiance. À peine descendue du navire, je me suis mise à en parler autour de moi, à mieux m’entourer. Je viens d’intégrer mon domaine, un milieu qui reste niché, et je suis en train de me bâtir un réseau avec des designers. Avant, je n’aurais pas eu assez de front pour faire ça! ».

Être entre femmes a permis un rapprochement naturel et « a fait tomber certaines barrières », un constat partagé. « En toute intimité, les mentores révèlent leurs secrets, notamment comment prendre sa place dans un milieu d’hommes! Naviguer dix jours ensemble ramène définitivement à l’essentiel. C’est une expérience mémorable qui soude et tisse des liens forts et durables.
On apprend à communiquer en équipe, à se faire confiance, on n’a pas le choix! Sur le bateau, il faut travailler ensemble. On vit les difficultés au jour le jour à l’unisson et on sort tous de notre zone de confort! », expliquent Joëlle et Jade.
Un programme de mentorat dédié
Le partage d’expertise est la partie incontournable du programme. « Savoir que des femmes qui ont réussi en affaires sont passées par là où elles sont en ce moment aident les jeunes tout en asseyant la crédibilité des mentores », raconte Joëlle, qui est aussi l’instigatrice du programme. Le mentorat se déroule sur un an. En amont et en aval de l’expédition, il y a des conférences, des ateliers et des activités de réseautage. En tout, une cinquantaine de femmes participent au projet. « Elles ne naviguent pas toutes. Certaines se greffent pour donner des conseils particuliers en fonction de leurs compétences et des besoins, d’autres offrent un service spécifique, mettent en relation ou inspirent simplement », explique-t-elle.

Je suis tellement impressionnée par la volonté de ces femmes pourtant si occupées ailleurs à vouloir faciliter la route de celles qui leur succéderont. – Joëlle Boily, ÉcoMaris

Marie-Hèlène Weiss, intrapreneure et directrice de production chez Game On, a fait partie de l’aventure maritime et offre une heure de son temps aux deux semaines. « Ce que j’ai apporté jusqu’à présent, c’est la structure, l’importance de regarder les opérations pour que les processus coulent d’eux-mêmes ». La suite n’est qu’un retour sur investissement. « J’ai hâte de voir les projets se matérialiser. C’est de l’eau au moulin pour moi aussi et ça contribue à bâtir mon réseau et à m’amener ailleurs ». Embarquer dans le projet l’a allumé dès le départ : « Cette mission sociale me parle beaucoup. L’énergie sur le bateau est fantastique, accompagner des jeunes qui caressent des rêves et ont de belles idées, c’est plus qu’un truc professionnel, c’est avant tout très humain ».