Dominic Gagnon est un entrepreneur en série, sans conteste une personnalité brillante du monde des affaires, désigné comme l’une des personnes les plus innovantes aux côtés de Disney!
De producteur de spectacles punk à la création de sites web, en passant par la plus grande agence de marketing mobile au pays, jusqu’à fonder Connect&GO dont les bracelets intelligents ont été portés au SuperBowl et aux Jeux Olympiques, le p’tit jeune de trente-six ans, (reprenez votre souffle) qui est aussi chroniqueur, professeur, conférencier et mentor, a sans aucun doute « le TDAH sur stéroïdes ». Et c’est lui qu’il le dit !
Oh, et il vient de publier son troisième livre, « J’aime les zèbres ». On a donc parlé avec lui de sa vie de zèbre.
Dom a des petits yeux bleus fatigués. Il est tatoué sur les bras et même dans le cou. Il arbore un pinch et une barbe un peu à la Van Dyke, hipster sans avoir essayé. Assis, il a une patte qui shake ; debout, toujours une main qui se fait aller. En meeting, il se pointe avec une casquette. Il ne va pas s’empêcher de sacrer dans une conférence si bon lui semble. C’est un grand patron, multiple fois CEO, mais il a juste l’air d’un gars casual, avec qui on irait prendre une bière.
Un cran au-dessus de my next-door neighbour tout de même. Pardonnez l’emploi d’anglicismes qui feraient froid dans le dos à n’importe quel journaliste averti : autant assumer sans vergogne cet élan atypique!

Talentueux slasher depuis toujours
Rien ne prédestinait Dominic Gagnon à vivre cette carrière fulgurante. Quoique. Issu d’une famille modeste, ayant grandi parmi les bleuets du Lac et autres trippeux de chasse et pêche, il était « le p’tit tannant qui jouait pas assez dehors ». À la place, il se planquait devant son écran, apprenant à programmer. Et à pirater, un challenge le fun. « À douze ans, j’avais cloné à peu près 300,000 $ de cartes de crédit. J’ai toujours su que j’étais différent. » En effet, le lien est assez évident.
À quatorze ans, il fonde, non pas une, mais deux entreprises. Une maison de disques, qui devient le plus gros producteur de spectacles punk-rock du Saguenay, et une agence de création de sites web. Il a des employés sur le pay-roll à temps plein pendant qu’il va à l’école.

Une semaine après son entrée à l’université, déjà blasé, il achète quatre segways et fonde Piranha avec des copains. À la Steve Jobs. Dom n’a alors qu’un objectif en tête : révolutionner la publicité! Quatre ans plus tard, l’agence de marketing mobile devient la première du genre au pays et s’établit à Québec, Montréal, Toronto et Paris. Elle passe à soixante employés et fait un chiffre d’affaires de dix millions. À vingt-trois ans, Dominic est au top.
D’où il fait une chute vertigineuse. « J’étais dans l’euphorie entrepreneuriale, sur toutes les tribunes, avec un égo démesuré, je gagnais un prix après l’autre », avoue-t-il sans gêne. Après avoir découvert une fraude, il relève les brides en toute hâte, en mode survie. De l’échec, il apprend, et notamment les finances. Il redresse l’entreprise et repart, les cheveux au vent.
Avec un associé, il lance Connect&GO, qui connaît la gloire depuis plus d’une décennie. Tatouages semi-permanents pour payer avec son épiderme pour le SuperBowl, contrôles d’accès avec reconnaissance faciale privée, et autres méthodes de paiements sans espèces et sans friction. Enter, Pay, Play. Il y a même des lunettes de soleil pour entrer et payer aux JO et une monnaie virtuelle pour le parc olympique qui règle enfin le problème des différentes devises! Dominic pivote sans cesse. Pour assurer une meilleure récurrence des revenus, il passe de l’événementiel aux installations permanentes, comme les stations de ski, musées, zoos et parcs d’attraction. « On a bien eu une dizaine de modèles d’affaires! », lance-t-il heureux, sérieux.
À trente-six ans, il a l’avenir devant lui. Slasher, polymathe, multi-potentiel, Dominic fonce partout où il en a envie : « Rien n’est impossible ». Il a des visées dans le secteur de la santé, mais aussi le commerce de détail. « La meilleure façon de prédire le futur, c’est de l’inventer » : c’est le titre de la conférence qu’il donne un peu partout au Québec pour stimuler l’innovation.

Hyperactif, TDAH ou zèbre?
Tout à la fois! « Il faut être fou pour entreprendre, je le dis souvent! » À une étude de la Harvard Business School, « 75% des entrepreneurs souffrent de maladie mentale », Dom ajoute : « et les 25% qui restent ne sont juste pas au courant! »

À vingt-quatre ans, Dominic avait reçu un premier diagnostic : un joli cocktail de trouble d’attention et d’hyperactivité physique et mentale, avec dyslexie, dyscalculie et trouble d’opposition élevé. Cela expliquait enfin ses comportements douteux à sa femme! « J’avais l’impression que je pouvais tout expliquer par mon TDAH : mon hyperémotivité, mon hyperesthésie (acuité des sens), mon désir de contourner les règles insensées, mon impatience ou ma procrastination au travail, etc. »
Comme Elon Musk, à qui l’on a souvent collé l’étiquette d’autiste, Dom s’était mis à penser qu’il était peut-être asperger aussi. C’est en France qu’il a entendu parler de la douance. Un deuxième diagnostic a confirmé qu’il était tout près du profil à Très Haut Potentiel Intellectuel (THPI, 0.2% de la population). « Ça a été tout un déclic! Comprendre d’où venait mon décalage, mon mal-être, ma frustration, c’était la moitié du chemin de fait. Savais-tu qu’un cinquième des personnes en prison est doué? Ça explique le crime organisé, et même mon piratage! »
Dominic a été refusé trois fois à l’université, parce qu’il était ailleurs et peu intéressé ou stimulé. Doué, vraiment? À l’école, on lui a dit qu’il ne ferait rien de bon dans la vie. Mais il a su déjouer les pronostics et les tourner à son avantage. Et il est loin d’être un paquet de troubles!
Zèbre, le parfait entrepreneur
« L’autre 50% du chemin est dans l’auto-motivation, faire ce qu’on aime, y trouver son compte. Sinon on tombe dans l’apitoiement, la procrastination, les frustrations, le doute. » Comme tous ces visionnaires, leaders, artistes passionnés, émotifs, perceptifs, chaotiques, obsessionnels, déprimés, et exceptionnellement talentueux. Mal apprivoisé, ce type d’intelligence hors du commun ne rime pas toujours avec le succès.
« Pour les zèbres, il y a un lien extrêmement fort entre la motivation, la performance, les ambitions et faire ce que l’on aime. Aujourd’hui, je me suis donné le privilège de faire uniquement ce que j’aime. »


« C’est bizarre pour un CEO de dire ça, mais je ne suis pas un joueur d’équipe. L’image du sportif rassembleur qui ralentit pour pousser dans le dos ses coéquipiers est belle, mais je n’ai juste pas la patience et je veux gagner. Alors j’ai créé mon propre rôle. Je n’ai plus une dizaine de personnes qui relèvent de moi, mais seulement une, qui est d’ailleurs mon antipode! Je délègue les processus, les tâches répétitives, ce dans quoi je ne trouve pas de sens et qui finirait par ne pas aboutir avec moi! Même le leadership, quelqu’un d’autre dirige la troupe là où je veux aller. »
« L’entrepreneuriat m’a sauvé. C’est choisir ce que je veux faire, être constamment occupé et relever des défis. Sans oublier ma psy, le sport et la méditation, pour canaliser mes énergies, garder ma créativité allumée et calmer mon cerveau!

Pour moi, le zèbre est naturellement un excellent entrepreneur, mais je pense qu’il n’est pas forcément un bon gestionnaire. » Alerte, 80% de ses décisions viennent de son intuition; son ressenti et sa capacité à colliger rapidement diverses données lui servent de gouvernail. Il sait quand ça ne marchera pas et vers où l’entreprise doit se diriger, même s’il n’arrive pas toujours à convaincre son équipe!
Dominic aimerait que l’on puisse mieux comprendre ces profils atypiques. Le haut potentiel intellectuel est une façon de penser différente, pas une supériorité. La génétique y est pour beaucoup, mais également l’environnement psycho-social. « Selon son milieu, on ne vivra pas le fait d’être doué de la même manière, par exemple. Le mot en soit est porteur de tellement de préjugés! » Un peu pour lui, mais aussi pour ses enfants, et pour tous les autres, Dominic a écrit le livre « J’aime les zèbres » afin d’expliquer et de démocratiser la douance, un sujet encore tabou au Québec.